Chronique

Cursed, Frank Miller et Thomas Wheeler

Résumé:

Nimue a échappé au massacre de son village. Sa mère, avant de mourir, l’a chargée d’une mission : remettre l’épée du pouvoir à Merlin, le sorcier redoutable.

Accompagnée d’Arthur, faux chevalier menteur et séducteur, et de la dévouée Morgane, Nimue sent grandir en elle la magie noire et ancestrale de l’épée.

L’arme fait d’elle une combattant féroce, rebelle, et le seul espoir de son peuple : la Sorcière Sand-de-Loup. Mais Nimue n’est qu’à l’aube de son destin.

Comment ce livre est-il arrivé entre mes mains?

J’ai commencé la série avec mon chéri et cela m’a donné envie de lire le livre. On a d’ailleurs mis en pause la série pour le moment.

Mon avis:

Nimue, jeune fey, est rejetée par son clan qui murmure dans son dos et la regarde de travers depuis « l’incident. Elle est marquée par une sombre magie à laquelle elle a survécu enfant. Bien que sa mère voit cela comme un miracle, les villageois dans leur grande majorité la considère maudite. Alors qu’elle est hors de son village, des fanatiques religieux, les Paladins rouges, massacrent son village. Manquant de se faire tuer en rentrant, sa mère a juste le temps avant de mourir de lui confier une épée qu’elle doit remettre à Merlin: l’épée du pouvoir. Elle se lance donc dans cette quête avec de nombreux doutes, des compagnons qu’elle connaît à peine et l’influence sombre de l’épée qui la pousse à puiser dans sa rage.

Ce récit a été écrit par un scénariste et cela se sent. Il y a des nombreuses scènes d’actions, combat d’épée, bagarres ou batailles savamment chorégraphiées. L’auteur nous laisse peu de temps pour souffler entre les attaques, impulsions guerrières de Nimue ou massacres des Paladins rouges. La découverte de l’univers est bien dosé entre l’exposition pure et les discussions plus subtiles entres nos protagonistes. Tous ces éléments forment un tout cohérent simple à suivre et qui démontre une maîtrise du « story telling ». Pourtant, j’ai parfois eu du mal à reprendre ma lecture. L’action permanente et l’impulsivité des personnages m’ont rapidement lassée. Je voulais savoir la suite, mais j’étais « fatiguée » par avance de toutes les péripéties, parfois inutiles, qui se glisserait entre le chapitre où je m’étais arrêtée et la résolution de ce premier tome.

De plus, Nimue est une héroïne particulière. Indépendante et volontaire, elle doute également beaucoup d’elle-même. Les années de harcèlement qu’elle a subit ont un impact important sur sa personnalité: elle pense pouvoir toute faire toute seule et a souvent des réactions impulsives quand son orgueil est piqué (ce qui lui cause beaucoup d’ennuis). J’ai trouvé intéressant que la personne choisie par l’épée soit loin d’être parfaite. Elle a de bonnes intentions et est du coté des opprimés, mais elle est loin de comprendre tout ce qui se passe. Elle est parfois ignorante et obstinée tout en essayant d’en apprendre un maximum. C’est un personnage intéressant, même si son impulsivité, aggravée par la puissance de l’épée de pouvoir donne souvent envie de la secouer dans tout les sens pour lui remettre les idées en place.

Les autres personnages sont également intéressants par rapports à leur contrepartie du mythe « classique » arthurien (même s’il en existe un grand nombre de version). Arthur est loin d’être un noble chevalier, c’est un mercenaire plutôt lâche pour qui la meilleure solution est la plupart du temps la fuite. Merlin est un mage qui a perdu ses pouvoirs, alcoolique et désespéré, conseiller du roi quand il est assez sobre pour le faire et surtout qu’il n’est pas en train de comploter pour atteindre ses propres buts. Uther Pendragon, le roi, est une homme qui a vécu toute sa vie dans l’ombre de sa mère froide et manipulatrice, éduqué par un Merlin, ombre de lui même et qui fait face depuis toujours à des rumeurs sur son statut de bâtard. Morgane, quant à elle est la demi-sœur d’Arthur, envoyée au couvent très jeune et qui fait tout pour aider le peuple fey à fuir les persécutions.

Il y a une histoire d’amour mais elle reste assez discrète. Notre héroïne n’a besoin de personne pour la sauver et bien qu’elle reste sentimentale au fond, se concentre sur sa survie et celle de son peuple plus que sur les beaux yeux de son prétendant.

Comme vous pouvez le lire, ce roman donne une version originale de ce mythe en ajoutant une version anglaise de l’Inquisition qui se bat contre les « démons » que sont les feys. Chaque personnage a une évolution intéressante, mais qui se perd souvent dans l’histoire globale. Les révélations sur d’autres personnages essentiels du mythe viennent plus tard dans l’histoire et sont également bien trouvés tout comme les retournements de situations qui se précipitent à la fin de l’histoire. J’ai beaucoup aimé le petit « Écureuil », jeune garçon dont le rôle est secondaire la plupart du récit mais qui est touchant et qui a beaucoup plus de ressources que l’on pourrait imaginer.

Je trouve pas mal de qualité à ce roman, le problème est que ces éléments positifs sont assemblés d’une manière assez peu attrayante et donne finalement un livre moyen. Les personnages sont intéressants mais peuvent être vraiment irritants et absurdes. L’histoire réinvente le mythe de façon originale, mais les scènes d’actions longues et à répétitions sont usantes. Les complots politiques et le fanatisme religieux des paladins sont très bien construits avec notamment l’incarnation du dévot absolu, le moine larmoyant, effrayant et fascinant dans sa violence et ses certitudes absolus au service du Père Carden, le leader de l’inquisition anti-fey sanglante. Pourtant, et je sais que ceci est encore plus subjectif que le reste, la violence parfois extrême sur laquelle l’auteur a tendance à s’arrêter m’a gênée. Je ne trouve pas que cela apporte beaucoup à l’histoire, l’image des feys brûlées vives sur des croix est déjà bien assez horrible à mon goût.

Tout cela pour dire que j’ai un avis profondément mitigé sur cette lecture. Il y avait un énorme potentiel mais la réalisation de ce livre n’est pas allée dans une direction qui me plaît. De bonnes idées, mais une construction à revoir! La série modifie beaucoup l’histoire mais au bout de 4 épisodes on est déjà un peu lassés alors je ne sais pas si je nous allons continuer tout de suite. Je lirais peut-être la suite par curiosité car la fin promet des changements radicaux dans cet univers, mais ce n’est pas un livre que j’attendrai avec impatience…

Livre en VO: Le niveau d’anglais est assez élevé du au vocabulaire riche et aux nombreuses scènes de combat. J’ai eu par moment besoin de traduire plusieurs mots sur une même page, ce qui est assez rare habituellement.

PS: Le livre est parsemé d’illustrations qui ne sont absolument pas à mon goût, même si elles représentent bien l’histoire. Le trait est assez gros et je n’aime pas. Bien sur, c’est totalement personnel, elles sont tout de même de qualité.

Informations pratiques:
Publié en France en 2020 par les éditions Gallimard Jeunesse, 576 pages (21€)
Existe en livre numérique (14.99€), en poche (8.90€) le 9/9/2020.
Titre original: Cursed

9 réflexions au sujet de “Cursed, Frank Miller et Thomas Wheeler”

  1. J’ai vu quelques illustrations sur le net et je ne suis pas non plus charmée… Le livre m’attirait pas mal à sa sortie mais je pense que regarder la série me suffira (j’en suis à plus de la moitié désormais) – j’ai bien d’autres priorités livresques 😉

    Aimé par 1 personne

    1. Elles sont spéciales ces illustrations !
      L’histoire du livre et de la série dévient fortement au début ( j’ai vu 4 épisodes). Je ne vois pas comment ils vont rattraper le truc pour revenir a l’histoir. Donc même si je ne suis pas fan de ce livre, le livre est asssez différent pour que la lecture en vaille la peine si on aime la série. Nimue notamment est très différente !

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